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Qu'est-ce qu'une obsession

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Les phénomènes psychiques sont depuis longtemps l'objet assidu de la psychiatrie et de la psychana­lyse.


Ces disciplines revendiquent « l'obsession » comme faisant par­tie de leur « terrain de chasse » privilégié. Mais la psychiatrie et la psychanalyse en sont restées lar­gement au stade du descriptif et n'ont pu jusqu'alors faire véritablement œuvre d'explication.


En fait les livres sont remplis « d'explications » et surtout d'inter­prétations psychologiques qui pré­tendent à l'explication des phéno­mènes. Mais aborder et croire ex­pliquer les problèmes psychiques par des finesses et des détours psy­chologiques n'ont jamais été des explications. Dire que le comporte­ment de dépendance d'un sujet adulte provient du fait qu'il ne s'est pas défait de son attachement à sa mère ou bien que possédant un comportement maternant à l'égard des autres il a manqué d'affection maternelle (compensation) ne relève pas de l'explication.


Évidemment, l'on peut bien « ex­pliquer » l'attitude ou les actes d'un sujet par les processus psychiques qui ont pu le « motiver », mais comment étendre cette explication à des anomalies comme les obses­sions, les impulsions, les accès né­vrotiques divers, etc.


Y aurait-il véritablement une ex­plication psychologique à de pa­reils comportements ? Nous som­mes ici au point crucial du pro­blème : l'équilibre mental plus ou moins rompu fait plonger l'être dans ses déterminismes physiolo­giques et c'est en cela qu'il y a trouble mental.


Autrement dit, le trouble mental est une limite imposée à notre li­berté ; mais ceci peut arriver aussi quand les lois de la vie ne sont pas respectées. La liberté n'est vraie que dans la soumission à la loi d'équilibre. Pouvoir l'enfreindre est précisément la marque de no­tre liberté mais celle-ci n'est réel­lement sauvegardée que dans le choix adéquat. Nous sommes donc libres de choisir ce que nous per­cevons être en dehors des lois de la vie mais c'est au risque de notre liberté. Autrement dit nous sommes libres pour pouvoir nous soustraire aux déterminismes qui pourraient devenir des carcans comme c'est le cas de l'obsession. Mais qu'est-ce que l'obsession ?


L'obsession peut être continue, mobile, variable, faisant partie en quelque sorte du moi psychologi­que sans apparaître dans l'expres­sion du moi social. L'expression cli­nique la plus intéressante serait les accès anxieux. Ces états peuvent être d'emblée primitifs chez les psychopathes obsédés, scrupuleux, ou s'intégrer à un état psychopathique général au cours de dépression ou d'états mentaux ou organiques (dé­lires, déments).


Les obsessions surprennent car souvent elles sont étrangères et en opposition avec la personnalité du sujet. Cet état résulte souvent de contrastes entre les tendances, les désirs du sujet et certaines repré­sentations mentales.


Quand l'obsession survient chez des individus lucides elle est cons­ciente, de telle sorte qu'entre les accès, l'autocritique peut se tra­duire par des regrets. Pendant les crises le sujet ne peut se libérer de l'emprise dont il est l'objet. La liberté, la lucidité de l'esprit sont entamées.


Un autre caractère de l'obsession est sa force à s'imposer à l'individu. Les obsessions idéatives consistent dans la rumination de souvenirs, de phrases, de sensations, qui sont partis de faits sans importance. Elles peuvent aboutir aux états anxieux ou phobiques avec remords injustifiés. Ces états peuvent pren­dre des formes de rumination in­tellectuelle, de rêveries angoissan­tes où les idées défilent rapidement, de façon incoercible, surtout dans les insomnies.


« Les auteurs écrit Gautier, ont surtout cherché à voir dans l'ob­session les modalités se manifes­tant au cours d'états morbides, ce qui ne leur a pas facilité l'exposi­tion... Ils ont été constamment gê­nés par le fait qu'elles sont fré­quentes aussi chez les gens en bonne santé intellectuelle ».

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  1. L'obsession peut atteindre les sujets les plus sains d'esprit chez qui elle n'apparaîtra qu'une fois dans leur vie sans laisser aucune trace. Elle peut se manifester chez tous les déments, névrosés mais aussi les fiévreux, les délirants des maladies infectieuses, les intoxi­qués. Aucun être n'est absolument certain de lui échapper.

  2. Les obsessions à tendances pa­thologiques s'accompagnent tou­jours d'idées rudimentaires, gros­sières, banales sinon habituelles. Si elles sont idéologiques elles peuvent s'appliquer aux idées scientifiques, biologiques, philosophiques, socia­les, religieuses etc. Si elles sont plus d'ordre esthétique, elles mènent au sectarisme, au fanatisme. Quand elles touchent à des connaissances scientifiques, elles se manifestent sous forme de « marotte » avec des conceptions par trop imaginatives.

  3. Les obsessions peuvent appa­raître en combinaison avec nos dé­sirs, nos tendances, nos passions, mais aussi nos songes dans certaines visions cauchemardesques à ré­pétition. L'impression de s'écraser au sol correspond à une très forte et subite hypofonction des activités glandulaires avec affaiblissement de la circulation cérébrale (Gautier).

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Le cas d'obsession onirique nous indique que ce processus n'est pas uniquement psychologique. Étant fonctionnel il peut affecter les diverses parties du corps. Si les mo­dalités de l'obsession se manifes­tent dans l'ensemble somatique, elle peut provoquer des vertiges, des éblouissements, des pertes de con­naissance, des absences, syncopes, etc. « Peut-être faudra-t-il écrit Gau­tier, y rattacher les mouvements spasmodiques à répétition : tics, gri­maces, attitudes stéréotypées, etc. ».


Dans l'ensemble glandulaire, l'ob­session provoque la joie, la peur, les craintes, les angoisses, l'anxiété, l'impatience, les agitations, la tristesse, la mélancolie et les affectivités de toutes sortes.


Enfin dans le cerveau, elle peut amener des retours fréquents d'idées. Toutes ces explications dis­sociées par l'analyse se trouvent ra­rement séparées chez un sujet. État organique, fonctionnel, émotivité, sensation et intellectualisé y parti­cipent dans des proportions varia­bles.


Gautier a établi l'origine thyroï­dienne des obsessions. En réalité, il a pu établir que ce n'est pas tant la thyroïde sécrétoire que sa partie nerveuse qui est responsable de l'obsession. Ce qui l'indique c'est l'état de dépression, de crainte, de frayeur avec idées appropriées ; on ne peut donc incriminer la sécré­tion thyroïdienne puisqu'elle est en insuffisance. Ce sont alors les pos­sibilités nerveuses de la thyroïde qui se réveillent avec mise en mar­che des enregistrements automati­ques. Les activités nerveuses de la thyroïde interviennent :

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  1. Quand elle est en grande activité sécré­toire ; les instigations nerveuses sont alors du même sens que les effets hormonaux. C'est le cas de la joie où le sujet rit, s'agite, parle fort et vite, bat des mains, trépigne, manifestations d'automatismes ner­veux enregistrés et mis en marche par la partie nerveuse de la thy­roïde.

  2. A l'état normal, pendant nos activités diverses. Il peut y avoir dans ce cas des effets nerveux thy­roïdiens favorisant ou inhibant les effets de la sécrétion thyroïdienne selon les nécessités d'activité.

  3. Quand la thyroïde se place en hypofonction sécrétoire en raison d'influences contrariantes. La partie nervo-thyroïdienne s'active pour as­surer la marche des organes vé­gétatifs et sauvegarder l'existence de l'individu.

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Ces considérations glandulaires semblent bien loin du phénomène obsessionnel mais, seules, elles ex­pliquent véritablement, avec possi­bilité thérapeutique directe, com­ment peut naître et évoluer une obsession.

 

Jean du CHAZAUD La vie claire Juillet 1978

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