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Le rôle inconnu de la glande génitale

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IL est très difficile de brosser en quelques lignes le tableau com­plet d'une découverte qui occupe plusieurs livres. La découverte du vrai rôle de la glande génitale a demandé à Jean Gautier bien des recherches, des observations et des vérifications. Une fois acquise la certitude de son rôle foncier il restait à faire connaître au monde scientifique des faits qui devaient bouleverser nombre d'idées en psy­chologie, en psychiatrie et dans nombre d'autres domaines, en un mot la connaissance de l'homme.


Il est vrai que le freudisme n'in­citait pas à une telle connaissance qui stigmatisait les bienfaits de la continence et le rôle de la volonté dans l'équilibre psychique.


La glande génitale est surtout importante par sa partie endo­crine : la glande interstitielle que composent les cellules de Leydig est située dans le tissu interstitiel lui-même situé entre les canaux séminifères chez l'homme. Chez la femme, cette partie endocrine se situe au niveau de la trame de l'ovaire. La fonction reproductrice est une fonction spécialisée qui n'a censément d'autre but que la pro­pagation de la race.


Le fait majeur de la glande gé­nitale endocrine est paradoxale­ment son opposition fonctionnelle à la fonction reproductrice. Ce fait si insolite, constaté déjà chez l'ani­mal par le jeu de balance du rut et de la latence où l'on constate l'hypertrophie de l'interstitielle dans le repos sexuel et son atrophie pendant le rut, n'a pas intrigué les physiologistes outre mesure. Il est vrai que les constatations sur les animaux ne peuvent être que des indices... et il faut compter avec le compartimentage des domaines de spécialisation qui explique l'énor­me difficulté de la synthèse.


L'opposition de ce qu'on pour­rait appeler les deux puissances de la glande génitale devait bien avoir une signification chez l'hom­me où de multiples et séculaires observations, ainsi que la clinique, montraient le rapport certain entre un usage immodéré de l'activité sexuelle et la diminution des fa­cultés morales et intellectuelles. Certes, le débat n'est pas clos et en raison des phénomènes d'équi­libre, l'accord entre les tenants d'une activité sexuelle nécessaire à l'équilibre physiologique et ceux qui en soutiennent l'aspect très se­condaire est loin d'être total. Cela peut varier avec les individus en fonction de paramètres multiples mais ils font figure d'exception et de cas particuliers car la constante reste : l'hypertrophie sexuelle atro­phiant la volonté est une donnée intangible de l'observation dans un nombre de cas très importants.


Il ne s'agit pas de polémique ni de débat moral mais de montrer que la génitale endocrine ou inters­titielle a effectivement un rôle ren­du plus efficace par la continence sexuelle librement consentie. Com­ment ne pas voir alors que la vo­lonté se trouvait liée à ce fonction­nement.


L'interstitielle est le démenti phy­siologique le plus formel aux théories de Freud. La constatation de l'atrophie partielle ou totale de l'interstitielle dûment constatée au microscope chez tous les déments, les tendances aux psychoses des castrés avant sept ans ainsi que leurs tendances immorales invété­rées devaient aussi peu à peu ame­ner à penser que la génitale jouait un rôle important dans l'équilibre général de l'être humain. Au plan expérimental des extraits intersti­tiels ont montré l'effet de soudaine régulation des états mentaux d'agi­tation ou d'anxiété pathologique où le sujet avouait avoir retrouvé le déroulement normal de ses idées. Ainsi pouvait-on comprendre que l'activité sexuelle exagérée, ayant une incidence sur l'atrophie inters­titielle, diminuait en même temps les qualités d'équilibre et amoin­drissait la volonté.


Un autre fait majeur est l'hyper­trophie de l'interstitielle au cours de l'âge mûr et de la vieillesse à la condition que le sujet ait vécu selon un certain mode compatible avec l'activité de cette glande. La glande génitale interstitielle est un facteur remarquable de longévité car, régularisant l'équilibre glan­dulaire, elle permet une verte vieil­lesse. Le mode de vie et d'alimen­tation est en effet fort important ; Régaud, en 1907, avait observé une régression de l'interstitielle chez certains vieillards alors que d'autres observations montraient au contrai­re une évolution de cette glande, ce qui restait incompréhensible sans saisir l'importance du mode de vie et d'alimentation sur l'influence fonctionnelle de l'interstitielle.


Outre les qualités et possibilités diverses octroyées par la glande génitale interstitielle, il est intéres­sant de saisir, comme nous l'avons fait pour les autres glandes, la par­faite analogie qu'il y a entre les possibilités physiologiques et les possibilités psychiques de cette glande endocrine. C'est par ce biais que nous saisissons mieux le comment des relations du corps et de l'esprit dont les glandes sont le lien absolu en même temps que la réponse au vaste problème psycho­somatique.


Ce n'est pas être mécaniste que de dire : si l'hypophyse possède physiologiquement des qualités comparatives et évaluatrices en raison de sa partie mi-nerveuse et mi-glandulaire, elle sera source, in­tellectuellement, de nos possibilités idéatives de comparaison et d'éva­luation des mesures et des quan­tités. L'expérience et l'observation ont depuis longtemps justifié et lé­gitimé cette inférence du physiolo­gique au psychique au point de vue glandulaire.


Pour l'interstitielle il est aisé de comprendre que si son hormone est régulatrice par le fait même qu'elle est la plus stable et celle qui disparaît la dernière dans le sang circulant par rapport aux autres hormones, elle pourra dès lors exercer psychiquement une influence de stabilité et de régula­tion des humeurs et des émotions. Ceci est d'autant plus facile à ad­mettre que tous les savants ont reconnu le tribut que payent les émotions à nos glandes endocrines. Si donc cette hormone est régu­latrice, elle s'oppose aux écarts fonctionnels des autres glandes, en corrélation avec l'hypophyse et se­lon des processus de feed-back (rétro-action). Ce sera aussi la glande de l'équilibre physiologique ; si donc l'hormone interstitielle maintient en nous l'équilibre phy­siologique, ce sera aussi celle de l'équilibre psychique, de l'égalité d'humeur et celle d'une parfaite adaptation psychique. Idéativement et intellectuellement, les interstitiels sont les sujets qui conçoivent le mieux la notion d'équilibre. Ils le cherchent partout, dans les formes et les êtres ; ce sont des créateurs de beauté et d'harmonie. Il est inutile de préciser que l'art mo­derne n'est pas le fait d'interstitiels mais d'hyperthyroïdiens fantasma­tiques, souvent en vaine recherche d'équilibre. En art, ce sont les Grecs qui semblent s'être appro­chés le plus de cette forme artis­tique d'équilibre.


Il est beaucoup plus délicat d'aborder la question de la volonté en raison de cette séculaire sépa­ration du corps et de l'esprit dont Descartes porte une lourde respon­sabilité. Comment un Gautier a pu saisir la relation directe entre la puissance interstitielle et le phé­nomène volontaire dont il vérifia très soigneusement la permanence ? La question sexuelle devait aider à cette compréhension dans le fait que la continence sexuelle hypertrophiait les cellules interstitielles tandis que l'abus de cette activité les atrophiait. Autrement dit, con­trer volontairement une tendance comme la sexualité — ce que ne peuvent les animaux — était rendu possible par ce fonctionnement. L'interstitielle pouvait alors être considérée en quelque sorte comme un principe fonctionnel « anti-ten­dance ». La volonté est bien fon­damentalement le pouvoir de réfreiner une tendance, la tendance étant, pour ainsi dire, l'expression d'un trop-plein de vitalité cherchant sans cesse la satisfaction : c'est le fait de la glande thyroïde ; et le plai­sir augmente toujours la puissance fonctionnelle de cette glande. Il est alors normal de penser que la régulation interstitielle apportée à cette tendance au plaisir d'origine thyroï­dienne, sera concrétisée par la no­tion de volonté. On ne peut pour au­tant, dans ces considérations, nous taxer de matérialiste ou de détermi­niste : on ne peut en effet conce­voir que la volonté — notion liée à celle de liberté — soit « déter­minée ». La contradiction est dans les termes.


En fait, la fonction interstitielle ne va pas de soi ; elle demande la volonté pour son développement mais celle-ci demande nécessaire­ment son activité pour se manifes­ter. C'est encore, ici, la manifes­tation d'un équilibre car sans ce principe régulateur en même temps que stimulateur, l'anarchie régne­rait dans les fonctionnements glan­dulaires et le sujet ne pourrait plus exercer de régulation ni d'opposition à ses injonctions endocriniennes. D'où le rôle de l'édu­cation.


C'est précisément le cas du dé­nient qui a perdu la vraie cons­cience de lui-même en même temps que tout pouvoir de s'opposer à ses tendances. Il est devenu l'ob­jet de ses propres poussées de ten­dance, fonction elles-mêmes de ses particularités endocriniennes spécifiques. Le dément est aboulique.
Si donc l'anarchie fonctionnelle règne chez le psychotique par inef­ficacité interstitielle, on conçoit qu'intellectuellement il devienne un être incohérent ayant perdu le sens du réel.


Ce parallélisme pourrait être en­core poussé plus loin ; pour la notion de finalité par exemple. Il existe des êtres qui ont un sens aigu de la finalité, d'autres n'en ont aucun. C'est une source de querelles et de discussions entre les hommes car toutes les produc­tions intellectuelles peuvent en être influencées. Disons pour clore que, physiologiquement, l'interstitielle se prépare très tôt à un fonctionne­ment efficace (première puberté : huitième jour) : d'une part, les pubertés ont pour « but » de la faire « démarrer » à trois époques successives de la vie de l'enfant, d'autre part, c'est la seule glande qui s'hypertrophie jusqu'à la fin de la vie humaine, avec cependant les réserves dont nous avons parlé.

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Jean du CHAZAUD La vie claire Mars 1978

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